Épisode 99

December 15, 2023

Michael Schnitman – Les placements alternatifs dans le marché des clients fortunés

Michael Schnitman, directeur général principal, clientèle fortunée à Gestion SLC, parle du marché des clients fortunés et explique pourquoi l’adoption des placements alternatifs est une tendance importante.

Steve Peacher : Bonjour à tous! Ici Steve Peacher, je suis le président de Gestion SLC, et merci d’être à l’écoute de cette émission. Je suis très heureux d’être en compagnie de Michael Schnitman. Michael est vice-président principal à Gestion SLC, chargé de diriger notre incursion du marché de la clientèle fortunée. Michael et moi étions collègues il y a des années, alors c’est une joie de pouvoir de nouveau travailler ensemble. Merci, Michael, d’avoir accepté mon invitation.

Michael Schnitman : Tout le plaisir est pour moi.

Steve Peacher : Donc comme je l’ai déjà mentionné, nous parlerons du marché de la clientèle fortunée, et en particulier de la demande en placements non traditionnels sur ce marché. Et je pense qu’il faut commencer par les investisseurs institutionnels, car ce sont eux qui ont vraiment lancé cette tendance. Je sais qu’une étude récente, réalisée par Fidelity je crois, a montré que près de 90 % des institutions, des investisseurs institutionnels, des fonds de pension, etc. répartissent une partie de leur portefeuille dans des placements non traditionnels, soit 23 % des actifs en moyenne. Cependant, l’on constate que seulement 30 % des conseillers financiers de particuliers et d’investisseurs fortunés investissent les actifs de leurs Clients dans des placements non traditionnels. Quelle peut en être la raison? Et pourquoi les institutions sont-elles si enthousiastes d’investir dans ceux-ci? Et pourquoi les conseillers financiers et les investisseurs particuliers ne sont-ils pas aussi nombreux que les institutions à investir dans les placements traditionnels?

Michael Schnitman : C’est dû au fait que les conseillers des particuliers éprouvent de la difficulté à accéder et à sélectionner les gestionnaires de portefeuille de placements non traditionnels, mais aussi au fait qu’ils sont relativement nouveaux sur les marchés privés. Ils doivent donc se familiariser avec ce type de gestionnaires de portefeuille, et apprendre à les sélectionner. Mais, ils doivent d’abord apprendre à accéder à ceux-ci. Il y a également des coûts perçus sur les marchés privés. Enfin, il faut tenir compte de la liquidité des placements qui sont au centre des préoccupations de tout conseiller et de ses Clients. Ainsi, les marchés privés tels que le capital-investissement, l’infrastructure privée ou le crédit privé consistent en des investissements dans des titres peu liquides. Or les conseillers et les investisseurs particuliers sont habitués à investir dans des placements liquides, notamment dans des fonds communs de placement ou des fonds négociés en bourse. Cela peut donc constituer un défi lorsqu’il s’agit de répartir l’actif dans l’ensemble du portefeuille du conseiller. Et bien sûr, le montant minimum qui doit être investi dans un placement sur les marchés privés peut atteindre 10 millions de dollars ou plus, et il est évident que les investisseurs particuliers, en général, ne disposent pas d’une telle somme à investir dans un seul placement. C’est pourquoi, au cours des dernières années, les structures des placements traditionnels ont été modifiées de manière à répondre aux besoins des conseillers de particuliers et de leurs Clients. Vous avez vu la croissance des fonds communs de placement à fenêtre, des fonds de placement à capital fixe, et d’autres instruments de placement, tels que les fonds d’offres publiques d’achat, qui permettent aux investisseurs particuliers fortunés d’accéder à des catégories d’actifs auxquelles seules les institutions pouvaient accéder auparavant sur les marchés privés. Mais cela n’est possible que depuis quelques années, et la plupart des conseillers ont encore beaucoup de difficultés à comprendre ces types de structures de placements et de catégories d’actifs, ce qui a freiné la croissance des placements non traditionnels au sein des investisseurs particuliers, contrairement aux institutions qui ont de plus en plus investi dans ce type de placements au cours des dernières décennies.

Steve Peacher : Vous avez mentionné quelques-unes des contraintes que les investisseurs particuliers doivent prendre en compte lorsqu’ils investissent dans des placements non traditionnels, et qu’ils ne sont pas tous prêts à accepter. En général, ce type de placements attirent les investisseurs fortunés, car ils disposent de suffisamment d’argent pour détenir des avoirs importants dans un portefeuille très diversifié. Quelles sont les raisons pour lesquelles les investisseurs fortunés envisageraient sérieusement d’ajouter des placements non traditionnels à leurs portefeuilles de placements?

Michael Schnitman : L’une des principales raisons est qu’ils veulent diversifier davantage leurs placements. Si l’on compare, par exemple, le nombre d’entreprises cotées en bourse en Amérique du Nord et le nombre d’entreprises privées en Amérique du Nord, seuls 2 % des entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 10 millions de dollars sont en fait cotées en bourse. Ainsi, si vous ne vous prévalez pas de l’accès aux placements sur les marchés privés, vous manquez 98 % des occasions de placement dans les marchés du crédit privé, des infrastructures privées et du capital-investissement. La diversification est donc la principale raison d’investir dans les placements traditionnels. Deuxièmement, ils cherchent aussi à améliorer les rendements ajustés au risque et à tirer profit de la volatilité réduite des marchés privés. La prime d’illiquidité propre aux marchés privés peut contribuer à augmenter les rendements et à atténuer certains schémas de volatilité. L’ajout de placements dans les marchés privés au portefeuille 60/40 existant d’un investisseur particulier peut donc contribuer à la frontière efficiente globale de ce portefeuille. Cela contribue aussi à la générer des rendements plus stables. Et les marchés privés jouent un rôle important de contrepoids. Il est également important de noter que les investisseurs particuliers n’ont pas eu le même accès aux marchés privés que leurs ancêtres. Ainsi, au début et au milieu des années 1900, et même jusqu’aux années 1980, de très nombreux salariés ont travaillé dans des entreprises pendant toute leur carrière, ont participé à des régimes à prestations déterminées, et ces régimes ont toujours eu accès aux marchés privés et à des composantes non traditionnelles. En effet, au cours des 20 dernières années, ces régimes à prestations déterminées ont augmenté la part des marchés privés et des investissements non traditionnels. Pourtant, dans le même temps, la responsabilité de l’épargne-retraite est passée de l’employeur, par l’intermédiaire d’un régime de retraite, aux employés, ou participants au régime, et ces derniers n’ont pas eu accès aux placements non traditionnels ni aux marchés privés. Il y a donc eu une lacune qui n’existe pas pour les investisseurs particuliers. C’est pourquoi il est très important que les investisseurs particuliers commencent à se tourner vers les marchés privés afin de retrouver les expositions qu’avaient leurs parents et leurs grands-parents lorsqu’ils participaient à des régimes à prestations déterminées. Le nombre d’années pendant lesquelles ces employés doivent épargner pour accumuler autant que leurs ancêtres est, nous nous en rendons compte, un défi de taille.

Steve Peacher : Je pense que vous soulevez un point très intéressant en ce sens que, malgré toutes les innovations dans le domaine de la finance et des investissements, comme vous le soulignez, les particuliers qui épargnent actuellement pour leur retraite sont, dans une certaine mesure, désavantagés par rapport à leurs ancêtres, parce que, et ils ne le savent même pas, ils ne bénéficient plus d’une exposition à certaines catégories d’actifs, comme c’était le cas pour leurs ancêtres pendant des années, qui participaient à des régimes de retraite à prestations déterminées qui étaient exposés à toutes ces catégories d’actifs, lesquelles ne sont pas disponibles dans d’autres types de régimes d’épargne-retraite, comme les régimes d’épargne-retraite par capitalisation. C’est effectivement un bon point. La plupart des épargnants n’apprécieraient pas cela. Il s’agit donc d’un phénomène qui prend de plus en plus d’importance. Quelles sont les tendances observées sur le marché des clients fortunés, à la fois en termes de demande, mais peut-être aussi en termes d’offre et de fournisseurs de ce type de placements?

Michael Schnitman : Je suis très enthousiaste de constater la croissance de ce type de placements au cours des quatre dernières années, aux États-Unis. Cerulli est une société d’études de marché bien connue dans le domaine de la gestion d’actifs. Si vous regardez les données de Cerulli, notamment des actifs des FPI non négociés, des fonds de placement à capital fixe, des fonds communs de placement à fenêtre et des fonds d’offres publiques d’achat, vous constaterez que les placements dans ceux-ci ont doublé au cours des 4 dernières années; cela est très prometteur. Si l’on considère également la performance globale du portefeuille 60/40 au cours des 12 à 18 derniers mois, cette faiblesse a été le catalyseur d’une demande accrue et d’une plus grande propension des gestionnaires d’actifs à proposer ce type de stratégies et à créer des structures permettant aux investisseurs particuliers accrédités d’accéder à ces placements dans les marchés privés. Il y a donc un nombre important de gestionnaires qui entrent sur le marché. Et les gestionnaires qui étaient déjà présents sur le marché facilitent davantage l’accès à leurs structures de placement, notamment en offrant plus de solutions de placement aux conseillers des particuliers qui veulent investir dans ces stratégies.

Steve Peacher : Il s’agit certainement d’une tendance de fond, je pense que vous et moi en sommes convaincus. Je pense que d’autres acteurs du marché en sont convaincus. Et il y aura beaucoup d’activité dans le secteur. Je pense que les placements non traditionnels auront la cote dans le secteur de la vente au détail pendant de plusieurs années. Michael, je vous remercie encore de m’avoir accordé cet entretien. Et, comme c’est mon habitude, je terminerai en vous posant une question personnelle. L’une des choses dont nous parlons beaucoup, vous et moi, c’est de nos expériences respectives des bateaux. D’après nos discussions, je sais que vous avez passé beaucoup de temps à faire de la voile pendant votre enfance. Parlez-moi donc d’une expérience particulièrement aventurière et intrépide que vous avez vécue sur un voilier.

Michael Schnitman : Oui, effectivement, Steve, je suis passionné des voiliers et j’ai passé toute ma vie sur l’eau. J’ai eu la chance, étant petit, d’avoir des parents qui possédaient un voilier sur lequel nous passions tous nos étés. Je me souviens d’une excursion particulièrement dangereuse en mer, mon père m’ayant demandé de déplacer le bateau du Southwest Harbor, dans le Maine, jusqu’au port de Boston. Il n’avait pas pu m’accompagner parce qu’il était accaparé par le travail à cette période de l’année. Nous avons donc quitté Southwest Harbor et nous sommes partis vers le sud-ouest en direction de Monhegan Island, qui est une sorte de point de départ si vous voulez aller plus loin au large. Nous sommes allés plus loin au large, puis il y a eu le brouillard. Tous ceux qui naviguent dans le Maine savent que le brouillard peut arriver et repartir sans crier gare. C’était dans les années 1980 et au début des années 1990. Nous pouvions donc nous orienter grâce au radar, mais il n’y avait pas encore de GPS. On naviguait donc à l’aide d’un système appelé LORAN, qui permettait d’utiliser une carte en papier pour trianguler notre position. C’était assez angoissant de se retrouver au milieu de l’océan, entre Monhegan Island et le port de Boston, à une centaine de kilomètres au large, dans le brouillard, à se demander quelle direction on doit prendre, à essayer de nous localiser malgré les courants et le vent qui emportaient le voilier dans toutes les directions, tout en essayant de gérer la consommation de carburant. Vous ne voulez pas utiliser votre moteur et ses nombreuses pièces mobiles. C’est ce genre d’expérience qui rend la navigation d’un voilier passionnante et amusante.

Steve Peacher : Ce que je sais des bateaux, c’est que le temps peut changer très vite, alors que tout semble tourner au ralenti, ce que votre expérience démontre très bien. Je vous remercie beaucoup, Michael, de cet entretien passionnant. Merci d’avoir partagé de précieuses informations. Je remercie également tous nos auditeurs d’avoir été à l’écoute de cet épisode de la série Trois en cinq.

Michael Schnitman : Merci, Steve, je suis heureux de m’être entretenu avec vous.

 

Étude menée par Fidelity en 2023, intitulée « A Study of Allocations to Alternative Investments by Institutions and Financial Advisors » : https://institutional.fidelity.com/app/proxy/content?literatureURL=/9909709.PDF  

[2] S&P CapitalIQ data, 2023

[3] SLC Management data, 2023

[4] State Public Pension Investments Shift Over Past 30 Years, Pew Charitable Trusts, 2014

[5] 2021 asset allocations in Fortune 1000 pension plans, Willis Towers Watson, 2022

 

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SLC-20231214-3281357