En mars, la chute vertigineuse des marchés et les bas niveaux sans précédent des taux d’intérêt ont nui à de nombreux promoteurs de régime. L’élargissement des écarts de crédit a aidé un peu en augmentant les taux d’actualisation. Mais dans bien des cas, les engagements des régimes de retraite selon l’approximation de la rente ont dépassé la valeur des portefeuilles avec couverture du passif exposés aux obligations sur l’ensemble de la courbe.
Les promoteurs de régime doivent maintenant prendre des décisions difficiles en matière de rééquilibrage. Compte tenu de leur faible niveau de provisionnement, ils doivent aussi voir s’ils veulent accroître le degré de risque de leurs portefeuilles, et à quel moment. Selon nous, le mieux est de se concentrer sur les objectifs à long terme du régime et de garder en tête le rôle de chaque composante des portefeuilles. En même temps, une certaine souplesse est nécessaire pour profiter des perturbations sur les marchés.
Nous traiterons ci-après des défis que nous avons aidé nos Clients à relever et de certaines des solutions que nous offrons aux promoteurs en réaction aux turbulences des marchés.
Avec un peu de chance, le portefeuille avec couverture du passif a rempli sa fonction. La conjoncture des marchés est exceptionnelle, mais heureusement, bien des promoteurs sont aujourd’hui plus aptes à y faire face qu’ils ne l’étaient ces dernières années.
Depuis quelques années, le dynamisme des marchés boursiers et la hausse des cotisations des promoteurs ont grandement amélioré le taux de provisionnement des régimes au Canada (il est passé de 91 % à la fin de 2014 à 102 % à la fin de 2019).1 De plus, la tendance à lier indirectement ou directement (au moyen d’un ajustement progressif) le niveau de provisionnement à la gestion des risques a stimulé l’intérêt pour la couverture du risque de taux d’intérêt (54 % des régimes du secteur public l’utilisaient en 2019, alors que 44 % des régimes du secteur privé l’utilisaient en 2017).2 Dans le contexte économique actuel, une telle couverture a pu compenser en partie le rendement négatif des composantes plus risquées des portefeuilles.
Rééquilibrage : Les promoteurs de régime qui veulent rétablir leur répartition cible en remplaçant des actifs à revenu fixe par des actifs axés sur la croissance devraient consulter rapidement leur gestionnaire de titres à revenu fixe pour déterminer la meilleure stratégie.
Dans la situation actuelle, il est important de faire la distinction entre rééquilibrage et augmentation du risque. La plupart des promoteurs ont obtenu un rendement nettement supérieur avec leurs actifs à revenu fixe qu’avec leurs titres de croissance comme les actions. Leur défi est maintenant de décider s’ils vont se départir de certains titres à revenu fixe, malgré les gains qu’ils rapportent, pour investir dans d’autres catégories d’actifs.
En période d’instabilité, le rééquilibrage des actifs de couverture et des actifs axés sur la croissance ajoute généralement de la valeur, ces catégories étant portées à revenir vers la moyenne. Mais en ce moment, le manque de liquidité et le fait que les marchés fluctuent constamment rendent la tâche plus difficile. Nous privilégions donc une approche disciplinée visant un rééquilibrage régulier et continu, qui prend en compte les contraintes de liquidité auxquelles sont soumis les portefeuilles grâce à la participation des gestionnaires.
Nous constatons que les activités de rééquilibrage ont parfois un effet inattendu sur la liquidité des portefeuilles de titres à revenu fixe. Le niveau de liquidité peut baisser quand un gestionnaire est forcé de vendre les titres les plus liquides (généralement les titres fédéraux) pour rassembler les fonds nécessaires au rééquilibrage. Compte tenu du comportement imprévisible des marchés du crédit, cela peut limiter la capacité du gestionnaire à profiter des perturbations en temps opportun. Selon nous, il est important que les promoteurs travaillent avec leur gestionnaire de titres à revenu fixe pour comprendre ces dynamiques évolutives. Ils pourront ainsi gérer à la fois leurs activités de rééquilibrage et l’incidence de celles-ci sur chacun de leurs portefeuilles.
Augmentation du risque : Le rajustement de la répartition stratégique cible doit s’appuyer sur l’appétence pour le risque du promoteur et non sur sa perspective à l’égard du prix des actifs.
Nous croyons que les promoteurs de régime devraient s’en tenir à leurs objectifs de réduction du risque à long terme, surtout actuellement. Puisque de nombreux promoteurs subissent une pression accrue dans d’autres volets de leurs activités, l’augmentation de la volatilité au sein des régimes de retraite n’est pas souhaitable. N’oublions pas que la couverture contre le risque de taux d’intérêt et d’écart de taux est encore faible dans la plupart des régimes. Les promoteurs sont donc déjà en bonne position pour faire face à des hausses de taux d’intérêt.
Les promoteurs dont les régimes sont bien couverts ne bénéficieront peut-être pas autant d’une éventuelle reprise des marchés. Mais si le portefeuille avec couverture du passif a rempli sa fonction au cours des dernières semaines, ils se trouvent dans une position plus avantageux à l’heure actuelle. D’ailleurs, la plupart de nos Clients qui utilisent des stratégies d’investissements guidés par le passif (IGP) veulent réduire la volatilité du niveau de provisionnement de leur régime.
En revanche, nous estimons que le contexte de volatilité actuel offre aux promoteurs différents leviers pour accroître le risque dans leurs portefeuilles tout en conservant une composante de couverture du passif efficace.
Pour les promoteurs de régime qui cherchent à augmenter leur exposition aux actions sans réduire leur ratio de couverture, les stratégies de superposition sont de bonnes solutions.
La plupart des promoteurs veulent augmenter leur pondération de titres à revenu fixe à long terme. Ainsi, le niveau de provisionnement de leur régime sera plus stable aux dernières étapes de leur stratégie d’ajustement progressif. Il est toutefois risqué de vendre des titres à revenu fixe pour financer l’achat d’actions dans l’espoir de faire l’opération inverse une fois que le niveau de provisionnement s’est amélioré. Cela peut coûter cher si les taux d’intérêt continuent de baisser, en particulier avec les niveaux de liquidité actuels. Par exemple, le coût de la vente suivie de l’achat d’une obligation de société à échéance de 15 ans peut atteindre 6 %, ce qui est beaucoup plus que dans des conditions normales de marché.3
Les stratégies de superposition sont de bonnes solutions de rechange pour rajuster la répartition de l’actif. Les superpositions d’actions ou d’obligations provinciales sont fondées sur des mises en pension. Ces instruments ont leurs limites en période de crise et il est essentiel de bien les comprendre. Mais utilisés avec soin, ils offrent une façon économique de modifier la répartition des placements d’un portefeuille sans changer le ratio de couverture.
Une superposition peut rehausser de façon synthétique l’exposition aux actifs axés sur la croissance ou rétablir l’exposition aux taux d’intérêt du portefeuille avec couverture du passif.